En parallèle du medh (chant religieux) qui est l'ancêtre du chaâbi, Alger possédait déjà un autre genre musical populaire qu'on appelle aroubi et qui puise ses modes dans la musique arabo-andalouse. Au temps de Cheïkh Nador, il y avait une pléiade d'artistes meddah (interprète du medh) tels que Mustapha Driouèche, Kouider Bensmain, El Ounas Khmissa, Mohamed Essafsafi, Saïd Derrar, Ahmed Mekaïssi, Saïd Laouar, Mahmoud Zaouche. Au début du vingtième siècle, existait déjà une tradition dans les fumeries de la Casbah d'Alger qui consistait à interpréter des istikhbar (improvisation musicale, prélude vocal improvisé sur un rythme libre) dans les modes musicaux sika et sahli tout en s'accompagnant d'un guember. À l'origine, les chants sacrés du medh étaient accompagnés par le son des instruments à percussion et des instruments à vent. Vers 1920, certains meddah ont commencé à introduire des instruments à cordes dans leurs orchestres à l'image des orchestres du aroubi algérois. Cette époque a vu la prédominance des textes puisés dans les répertoire des poètes du Melhoun1. Les musiciens ont commencé alors à adapter les textes interprétés aux modes andalous de l'école algéroise tout en travaillant la forme et l'orchestration. Ce n'était pas la forme musicale la plus appréciée, ni la plus écoutée car parfois les textes du Melhoun sont écrits en arabe dialectal marocain mais qu'en plus leur contenu est frappé d'anachronisme et ne reflète aucunement les évènements socio-historiques qu'a connus l'Algérie. Le medh était confiné dans la casbah d'Alger surtout dans les fumeries, peu à peu les artistes ont commencé à se produire dans les cafés arabes d'Alger durant le mois du Ramadhan. M'hammed El Anka a donné une nouvelle impulsion au medh. Il a introduit dans les orchestres du medh le mandole typiquement algérien. Grâce au moyens techniques modernes du phonographe et de la diffusion radiophonique, El Anka était désormais devenu le promoteur du medh, il est considéré comme le plus grand interprète du genre2. Les autres grands interprètes sont : Hadj M'Rizek, El Hachemi Guerouabi, Dahmane El Harrachi, Maâzouz Bouadjadj et d'autres plus récents2. En 1946, El Boudali Safir, le directeur littéraire et artistique de Radio Algérie pour les émissions en langues arabe et kabyle, désigna des musiques provinciales dont faisait partie le medh sous le nom générique de populaire dans la langue française mais ce n'est qu'après l'indépendance de l'Algérie et lors du premier colloque national sur la musique algérienne qui s'est tenu à Alger en 1964 que la dénomination officielle et définitive de chaâbi a été adoptée. Le mot chaâbi, a fait son entrée dans les dictionnaires de la langue française grâce à la reprise de la chanson ya rayah de Dahmane El Harrachi par Rachid Taha. Cette reprise a eu un succès mondial. Elle a même été chantée dans plusieurs langues. Le chaâbi est ainsi né au début du xxe siècle dans la région d'Alger notamment par le diaspora kabyles . Il est issu d’un mélange entre trois sources principales : la mélodie arabo-andalouse, le melhoun et la poésie amoureuse ainsi que la langue berbère dans un certain temps2. Le genre appartient dans sa forme à la musique arabo-andalouse mais enrichi aujourd'hui par divers influences arabe, européenne et africaine dans ses mélodies et gnawa et berbère dans ses rythmes3. Alger demeure son centre le plus actif, suivi par dans une moindre mesure, la ville de Mostaganem2. Cependant, il est apprécié dans toute l'Algérie, pour l'aspect moral et social de ses textes3.